Témoignages
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3 mai 2022

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Comment est née votre passion du paysagisme ?

Je suis originaire de la Gâtine poitevine, région rurale située en Nouvelle-Aquitaine, au cœur du département des Deux-Sèvres. Mes parents étant agriculteurs, j’ai grandi dans un environnement naturel exceptionnel. Dès la troisième, une conseillère d’orientation m’a dirigée vers un BEP paysagisme. Alors qu’auparavant, j’avais toujours eu des difficultés scolaires, je me suis retrouvée première de la classe ! J’ai ensuite  passé un baccalauréat Sciences et Technologie de l’Environnement, option aménagement, puis un BTS aménagement paysagiste.

 

Comment se sont passées vos premières expériences dans le métier ?

J’ai travaillé dans plusieurs entreprises, de tailles différentes, mais je n’arrivais pas à trouver ce qui me correspondait. Bien sûr, cela m’a permis d’acquérir de l’expérience mais j’ai vite compris que les appels d’offre pour obtenir des marchés tiraient la qualité vers le bas. J’ai alors décidé, à l’âge de 24 ans, de créer ma propre entreprise, Les Jardins du Moulin.

 

C’était il y a 11 ans. Comment a évolué votre société ?

N’ayant aucune clientèle au départ, il a fallu montrer de quoi j’étais capable. J’ai commencé avec un salarié à mi-temps et très vite, les chantiers ont démarré : d’abord des travaux de création et d’entretien de jardins pour les particuliers puis pour les entreprises. Je suis restée dans mes convictions et ne réponds toujours pas aux appels d’offres. Après avoir installé la société chez moi, j’ai créé il y a deux ans un bâtiment artisanal pour notamment stocker le matériel. J’ai aujourd’hui deux sociétés : la Sarl Les Jardins du Moulin et une société dédiée à l’entretien. L’entreprise est agréée dans le secteur de l’aide à la personne, ce qui permet de proposer aux particuliers une offre de services aux conditions fiscales avantageuses. Mon mari menuisier a rejoint l’entreprise et j’ai donc 7 salariés.

 

Qu’est-ce qui vous plaît dans le métier de paysagiste ?

C’est un métier très large qui nécessite de multiples compétences. Je suis par exemple spécialisée dans la maçonnerie. Outre l’acquisition de connaissances végétales et techniques indispensables, il faut savoir encadrer des équipes, gérer la relation clientèle, les approvisionnements…J’aime le fait de suivre un chantier de A à Z, de soigner les détails, de travailler au rythme des saisons.

 

La crise sanitaire puis aujourd’hui les difficultés d’approvisionnement et la hausse du coût des matériaux ont-elles impacté votre activité ?

Pendant le Covid, j’ai eu énormément de travail car les enfants ne pouvaient se déplacer chez leurs parents pour faire des travaux d’entretien. Aujourd’hui encore, nous ne manquons pas de demandes !

En revanche, les augmentations des prix des matériaux nous impactent car il devient très difficile de chiffrer les devis, notamment sur le bois ou les clôtures. Du coup, dès que le chantier est signé, je commande le matériel à mes fournisseurs. Cela engendre des risques de vols et parfois c’est compliqué car il y a de nouvelles plus-values. Aussi le client doit me faire confiance. Pour le moment, je n’ai eu aucun désistement consécutif à la hausse des prix.

 

Dans votre approche paysagiste, avez-vous un style défini ?

Chaque jardin étant différent, nous nous adaptons et nous conseillons les clients en faisant parfois évoluer certains projets. Ne pouvant passer du temps à faire un plan, je réalise des croquis simples mais très explicatifs. Personnellement, j’aime beaucoup travailler le bois, les matériaux naturels et prendre en considération le contexte. Ainsi, nous ne faisons pas d’arrosage intégré pour les gazons, nous essayons de ne pas planter d’oliviers ou de palmiers, nous utilisons de la paillasse dans les massifs pour limiter l’évaporation du sol…Après, si les demandes des clients sont très précises, nous respectons leurs désirs.

 

Comment en êtes-vous arrivée à postuler au concours Madame Artisanat ?

Par hasard, en regardant le catalogue de la chambre de métiers et d’artisanat (CMA). Je voulais avoir le statut de Maitre Artisan, et la CMA m’a proposé de participer à ce concours où tous les corps de métier sont représentés. J’ai été distinguée parmi 280 dossiers mais j’avais déjà gagné en 2012, un an après ma création d’entreprise, le trophée de la femme Artisanat, et le premier prix du concours du meilleur stand au Salon horticole de Niort.

 

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Que représente pour vous cette distinction ?

C’est une grande fierté et un honneur car ce trophée encourage des vocations et promeut la mixité dans les métiers. En tant que femme, il faut toujours redoubler d’efforts, faire ses preuves, se montrer rassurante. De plus, le métier n’est pas toujours facile : il est assez physique, vous travaillez à l’extérieur par n’importe quel temps … Mais ce prix Madame Artisanat montre à toutes les jeunes femmes qu’il est tout à fait possible d’entrer dans ces métiers et qu’il faut arrêter de se mettre des freins.

 

Avez-vous rencontré des obstacles en tant que femme paysagiste ?

Lorsque j’étais en apprentissage, j’étais intimidée et j’ai reçu quelques remarques un peu lourdes. Même si cela peut parfois être un peu plus compliqué pour trouver un stage quand on est une femme, je trouve que les mentalités ont beaucoup évolué. Dans mon entreprise, mon équipe est essentiellement masculine et cela se passe très bien. Côté client, si un homme est gêné de travailler avec moi parce que je suis une femme, il peut se tourner vers d’autres entreprises mais cela ne m’est pas arrivé. Et puis la plupart des demandes d’espaces et de jardin émanent de clientes !

 

Quels conseils pourriez-vous donner aux femmes qui veulent se lancer dans le métier, et pourquoi pas comme vous, créer leur entreprise ?

Qu’elles tentent l’expérience ! De plus en plus de femmes sont séduites par ce métier très épanouissant, riche en rencontres. Bien sûr, lorsque vous créez votre entreprise, les tâches administratives peuvent devenir très vite chronophages. Cela peut être frustrant car vous êtes moins sur le terrain ; il faut donc arriver à s’organiser pour ne pas perdre le goût du métier. Je ne regrette aucun de mes choix et je souhaite vivement que mon expérience suscitera de nouvelles vocations.

 

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